Atelier coordonné par Tiziana Nicoletta Beltrame et Christine Jungen
Mardi 1er mars (9h30-17h30) – Mercredi 2 mars 2010 (9h30-13h)
Musée du Quai Branly - Salle de cours 3
ANR « Archiver. Les pratiques historiographiques au Moyen-Orient », IISMM-EHESS
Groupe de travail « Les êtres petits. La question de l’échelle et l’anthropologie », LESC/LAU-IIAC, CNRS/EHESS
L’émergence de la base de données comme outil permettant de gérer des accumulations de plus en plus considérables a amené des mutations profondes dans les modes d’organisation et d’accès des ressources documentaires. Les changements que ces mutations induisent dans la manipulation d’éléments divers (objets, documents, données), au sein de fonds ou de collections conduisent à repenser dans une perspective comparative l’ensemble des dispositifs de classement qui cohabitent aujourd’hui. Catalogues, inventaires, banques de données, répertoires, listes, index forment ainsi aujourd’hui un ensemble dialogique de structures physiques et numériques coexistantes répondant à un objectif commun : accommoder des éléments au sein d’ensembles, les ranger, les retrouver.
Si l’étude de la pensée classificatoire et du geste de classer qui s’y déploie sont devenus un topos des sciences humaines, l’étude des dispositifs qui, dans la vie courante, organisent et structurent matériellement les manières de catégoriser, d’agencer et de faire coexister des éléments est encore dans ses prémices. Nous proposons d’aborder ici ces dispositifs comme des artefacts à part entière, à travers le maniement desquels se laisse saisir le travail d’accumulation, de refaçonnage et de redistribution d’objets, d’informations et de données qui organise et structure aujourd’hui la construction et circulation du savoir. Nous nous intéresserons en particulier dans cette perspective aux notions de répertoire (comme ressource dans laquelle sont puisés et modélisés des éléments, des genres, des types), de catégorie (comme mise en coexistence d’entités protéiformes), et de collection (comme dispositif d’invitation à l’assemblage).
Seront examinés les parcours de vie (et de mort) des dispositifs de classement et de rangement, leurs qualités matérielles (un catalogue imprimé par exemple opère de manière radicalement différente sur une collection qu’une banque de données), et la manière dont ils façonnent la compilation et manipulation des matières et matériaux : comment est conçue la finitude (ou l’infinitude) d’un ensemble cumulatif, sa malléabilité et ses possibilités de reconfiguration ? Comment sont exécutés les va-et-vient entre différentes matières, entre inventaire papier et matière numérique, entre une inscription dans une base et un objet dans une collection, entre un catalogue imprimé et une banque de données ? Quelles sont les opérations pour faire coexister, circuler, pour rendre maniables, commensurables et retrouvables des données composites et proliférantes ? Comment s’opèrent les glissements entre des objets et leurs avatars (entre l’objet physique et l’objet numérisé, l’objet et ses descripteurs), la construction d’équivalences (aussi bien entre les différents éléments d’une même base qu’entre les différentes configurations et formes d’une entité donnée), la mise en cohabitation et la coopération des matériaux ? Comment sont gérés, intégrés ou éliminés les incongrus, inclassables, restes ou résidus qui résistent ou regimbent à ces accommodements ?
L’attention sera portée aux opérations concrètes d’intégration de matériaux dans une base, à la construction et gestion des champs, mots-clés, descripteurs, tags, à la création de liens entre des données, des objets, des collections. Nous chercherons ainsi à identifier et décrire au plus près les pratiques de fragmentation et de réassemblage d’entités, le travail de standardisation et de réduction de la singularité, tout comme les opérations de catégorisation, de redistribution et de mise en réseau dans et en-dehors des différents dispositifs destinés à gérer l’accumulation de matériaux sous forme d’informations et de données. En cherchant à capter dans ses aspects les plus routiniers et les plus invisibles ce travail de configuration et de manipulation d’éléments, nous nous proposons ainsi de saisir in situ les opérations à travers lesquelles des matériaux, des catégories, des données, des objets, sont décomposés, façonnés, matérialisés, immobilisés et redistribués.
PROGRAMME
Mardi 1 mars
9h30-12h30
Yann Potin (Archives Nationales)
Inventaires, mots à maux. Enquête sur le caractère protéiforme des "instruments de recherche" des archives (France, XIX-XXe)
Tiziana Nicoletta Beltrame (LESC)
L’histoire des objets en « x » ou comment les inclassables rentrent dans l’inventaire muséal
Patrice Chevalier (CEFAS, Sanaa) (sous réserve)
Inventaire et numérisation : le cas des archives au Yémen
14h-17h30
Frédéric Keck (GSPM, CNRS)
Bioinformatique et biosécurité : compter et nourrir les virus
Morgan Meyer (CSI)
La banque de données comme objet-frontière entre amateurs et professionnels
Adam Mestyan (CEU, Budapest)
Reconfigurations : les dispositifs d’un nouvel ordre aux Archives Nationales d’Egypte
Mercredi 2 mars
9h30h-13h
Jean-Charles Depaule
Descripteurs et description dans l’indexation d’une photographie : quelques questions
Sophie Houdart (LESC, CNRS)
Thousand skies : les bases de données dans la conception en architecture
Christine Jungen (LAU-IIAC, CNRS-EHESS)
Décomposer pour distribuer : le catalogage de manuscrits arabes